Le racisme reste un problème d’avenir. Dans Peau noire, masques blancs, Frantz Fanon aborde et combat ce problème de front.
« Il n’y a pas de mission nègre ; il n’y a pas de fardeau blanc.
Je me découvre un jour dans un monde où les choses font mal ; un monde où l’on me réclame de me battre ; un monde où il est toujours question d’anéantissement ou de victoire.
Je me découvre, moi homme, dans un monde où les mots se frangent de silence ; dans un monde où l’autre, interminablement, se durcit.
Non, je n’ai pas le droit de venir et de crier ma haine au Blanc. Je n’ai pas le devoir de murmurer ma reconnaissance au Blanc.
Il y a ma vie prise au lasso de l’existence. Il y a ma liberté qui me renvoie à moi-même. Non, je n’ai pas le droit d’être un Noir.
Je n’ai pas le devoir d’être ceci ou cela…
Si le Blanc me conteste mon humanité, je lui montrerai, en faisant peser sur sa vie tout mon poids d’homme, que je ne suis pas ce « Y a bon banania » qu’il persiste à imaginer.
Je me découvre un jour dans le monde et je me reconnais un seul droit : celui d’exiger de l’autre un comportement humain, un seul devoir. Celui de ne pas renier ma liberté au travers de mes choix.
Je ne veux pas être la victime de la Ruse d’un monde noir.
Ma vie ne doit pas être consacrée à faire le bilan des valeurs nègres.
Il n’y a pas de monde blanc, il n’y a pas d’éthique blanche, pas davantage d’intelligence blanche.
Il y a de part et d’autre du monde des hommes qui cherchent.
Je ne suis pas prisonnier de l’Histoire. Je ne dois pas y chercher le sens de ma destinée.
Je dois me rappeler à tout instant que le véritable saut consiste à introduire l’invention dans l’existence.
Dans le monde où je m’achemine, je me crée interminablement.
Je suis solidaire de l’Etre dans la mesure où je le dépasse. »