Imane Do Vale est en train de révolutionner la lingerie féminine. Après Sciences-Po, elle aurait pu embrasser une carrière dans la finance, mais elle a préféré monter son entreprise et créer sa marque.
Quel est votre projet ?
Sublimer les femmes tout en respectant leur corps et leur santé. Les sensibiliser, également, sur la nécessité de prendre soin de ce corps, de se reconnecter à lui. C’est la mission que je me suis donnée avec Nissé, ma marque de lingerie qui réconcilie confort, féminité et santé.
Aujourd’hui très peu de personnes ont conscience que nos sous-vêtements, qui sont en contact direct avec notre peau, peuvent contenir des substances nocives pour notre santé. Les femmes sont particulièrement sensibles et exposées à ces substances, et ce, en parti pour des raisons biologiques (la grossesse, l’allaitement et la ménopause les rendent particulièrement vulnérables). Et même pour les femmes qui en ont conscience, les modèles de lingerie proposés ne les mettent pas forcément en valeur. Elles sont nombreuses à m’indiquer avoir l’impression de devoir faire un choix entre leur confort, leur féminité et leur santé quand il est question d’acheter de la lingerie. C’est pour répondre à ce besoin que j’ai créé Nissé. Et pour que cela ait du sens, il me fallait également trouver des matières durables et innovantes. Afin de respecter le corps de la femme ainsi que la nature dans sa globalité. Pour la première collection j’utilise la fibre de ricin, une matière 100 % d’origine naturelle, extrêmement douce et entièrement fabriquée en Italie.
D’où vous vient votre goût pour l’entrepreneuriat ?
Je l’ai sûrement hérité de mes parents qui ont tenu pendant près de 20 ans une boutique. Je revois mon père se lever chaque matin à 5 h pour assurer l’ouverture et ma mère s’occupait de nous avant d’aller le relayer dans la journée. Quand mon père a pris sa retraite, au lieu de lever le pied il s’est lancé le challenge de construire dans son pays natal un gîte touristique. Il a pris le risque d’y mettre toutes ses économies alors qu’il n’avait aucune garantie que le projet réussisse. Aujourd’hui Je me retrouve beaucoup en eux : j’aime tout comme mon père me lancer des défis, et, comme ma mère, je jongle entre mon statut d’entrepreneure de maman et d’épouse. Ce sont ces différentes facettes qui m’ont poussée vers l’entrepreneuriat, de manière très naturelle et progressive.
Quel est votre « business model » ?
Je veux faire moins, mais mieux, en proposant une lingerie de qualité, innovante et fabriquée à la demande grâce à un système de vente en précommande sur l’e-shop. Pour que ce système fonctionne, je travaille beaucoup sur les besoins et attentes des femmes, et ce, très en amont dans le processus créatif : Je co-développe chaque produit avec ma communauté, du choix des matières en passant par le design et la couleur, tout y passe ! Enfin, ce système est également possible grâce à mon atelier de fabrication situé en France, avec lequel je travaille main dans la main et qui me permet de produire à la demande.
Qu’est-ce qui vous fait croire en votre marque ?
Le fait que la marque découle directement d’un besoin grandissant chez les femmes : celui de porter une lingerie confortable et féminine qui respecte à la fois leur corps et la planète. Ce besoin je le partage avec les centaines de femmes que j’ai eu la chance d’interroger et qui font aujourd’hui partie de la communauté Nissé (600 femmes que je remercie pour le soutien qu’elles m’apportent au quotidien). C’est avec elles, et pour elles, que je construis la marque et les produits.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Aujourd’hui la première collection a été développée, les prototypes ont été validés. Je travaille actuellement sur le lancement d’une campagne de financement participative et sur la construction de l’e-shop. Il y’a aussi le premier talk Nissé qui arrive dans quelques mois : un concept intimiste, bienveillant et 100 % féminin. Le thème sera « un corps, deux regards » ou il s’agira, à l’aide d’exercices ludiques, de libérer la parole sur le rapport au corps à travers « deux regards » : le nôtre et celui de la société. Ce sera également l’occasion de présenter en exclusivité à la communauté les premières pièces de la collection Nissé.
Idéalement, comment vous projetez-vous à horizon dix ans ?
Dans 10 ans j’aimerais que Nissé soit rentré dans la garde-robe des Françaises comme synonyme d’une lingerie confortable, élégante et respectueuse. J’aimerais avoir sensibilisé un maximum de femmes sur ces questions de santé publique, leur avoir permis de prendre conscience de leur singularité. J’aimerais également avoir lancé de nouvelles gammes, dont deux qui me sont particulièrement chères : une ligne maternité et enfant.
Lorsqu’on entreprend, qu’est-ce qui est le plus difficile ?
Ce qui a été le plus difficile à gérer c’est la solitude des débuts. On commence souvent un projet seul, sans boussole ou mode d’emploi sur comment se lancer. Et très clairement, seul on est souvent très limité. Pour pallier cela, j’ai très vite cherché à m’entourer d’autres entrepreneurs et à intégrer cet écosystème pour bénéficier de « l’émulation de groupe ». En janvier 2020 j’ai intégré les Déterminés, extraordinaire association qui accompagne les jeunes issus des quartiers dans leur projet entrepreneurial. Cela m’a permis d’avancer plus vite et plus sereinement sur mon projet, et clairement se sentir entourée c’est inestimable !
Quels conseils auriez-vous envie de donner aux jeunes femmes qui veulent se lancer ?
D’écouter sa petite voix intérieure qui nous pousse. De se faire confiance et de ne pas attendre la validation des autres pour y aller, c’est souvent dans l’action que les opportunités se dessinent. Il est important de savoir s’entourer, de personnes bienveillantes qui sauront vous tirer vers le haut et vous faire « accoucher » du meilleur qui est en vous. Enfin je dirais, de ne surtout pas se décourager par le temps qu’un projet peut prendre pour voir le jour, ou par la quantité d’efforts à fournir : le plus important est d’avancer, chaque pas, minime-soit-il vous rapproche de votre objectif.
Qu’est-ce qui fait à vos yeux un bon projet entrepreneurial ?
Pour moi il y a trois paramètres indissociables : la personne, le besoin auquel le projet répond et l’exécution. Si les trois sont réunis c’est déjà une base solide pour se lancer ! Tout part de l’individu et de son alignement avec le projet, on parle souvent du fameux « why » de Simon Sinek. Pour moi, le « why » c’est ce qui va créer la première étincelle pour se lancer et qui va devenir par la suite un réel moteur. L’idée, quant à elle, ne se suffit pas à elle-même : elle doit répondre à un besoin réel et être transformée en réalité grâce à l’exécution.