Cet entrepreneur a fait du Globe & Cecil, l’un des hôtels les plus anciens de Lyon, un concept d’avant-garde. L’imperfection y est revendiquée, pour mieux la réduire ! A l’heure de la standardisation et du formatage, Loïc Renart crée des lieux de vie qui font du lien. A quelques encablures de la place Bellecour, le « Dirigeant-Entrepreneur et Aubergiste Lyonnais », comme il tient à se présenter, nous reçoit dans son bâtiment du 18 ème siècle relooké.
« Si j’avais grandi en banlieue, je serais devenu dealer ». Rebelle à l’institution scolaire, Loïc Renart avait tout d’un cancre, comme il aime à le dire. « L’environnement familial et l’amour reçu, cela m’a sauvé ». Il grandit dans l’hôtel familial au cœur de Lyon. Viré des Maristes, le cancre a des envies d’aventure et, dans sa soif de liberté, il est perfectionniste. Quand il part faire des randonnées à ski, c’est avec l’illustre guide de haute montagne, Jean Annequin. « Ça m’a forgé le caractère et une sacrée capacité de résilience ».
Acteur de sa vie
Sa planche de salut s’appelle l’Institut Supérieur d’Agronomie de l’Université Catholique de Lille où il intègre l’option Aménagement paysager. Revenu dans la capitale des Gaules, il développe des projets d’aménagement à Vénissieux et à Vaulx-en-Velin, ce qui lui permet de valoriser son potentiel de manager. Crise du secteur oblige, en 2009, il change d’univers en devenant cadre dirigeant dans une entreprise d’insertion. « Le côté social m’intéressait ». A ce poste, il est confronté au monde des grandes entreprises. Un électrochoc. Comme à l’école, il refuse de se laisser enfermer dans une grande structure. « Entrepreneur », il prononce le mot avec délectation. « J’avais envie d’être acteur de ma vie ».
En 2010, sa mère accepte de lui transmettre l’hôtel acquis par son grand-père en 1966. Il veut se départir de l’image de l’héritier qui se contente de reprendre une affaire. « Pas question de me retourner quelques années plus tard et de me dire que j’ai bien géré l’affaire familiale ». Il explique à la famille Renart qu’il veut « pérenniser, optimiser et développer l’hôtel ». Après une réflexion stratégique sur l’hôtellerie au XXIe siècle et ce qu’est être hôtelier indépendant, Loïc Renart affine son projet entrepreneurial qui tient en une formule. « Construire collectivement des places de vie locale à l’identité affirmée ».
Une grande maison de famille qui vit
Entouré d’une équipe, il ouvre son hôtel sur la ville « Les hôteliers traditionnels ont été trop longtemps refermés sur eux-mêmes, j’ai voulu que l’hôtel se voit, que ça respire, que ça vive ». Il ouvre un restaurant, le Comptoir Cécile où l’on trouve de bons produits de qualité du marché local qui attire vite les habitants et salariés du quartier. Surtout qu’aux fourneaux excelle le célèbre chef lyonnais, Grégory Cuilleron. Avec les clients de l’hôtel, Loïc Renart ne se gargarise pas de slogans marketing affichés dans les grands groupes hôteliers. Il assume un mot : imperfection. « Venir chez nous c’est accepter nos imperfections, signe d’une grande maison de famille qui vit, tout simplement ». S’il accepte les étoiles de la profession, il confie que ces classements peuvent être décernés à des lieux sans âme. « J’assume en tant que propriétaire exploitant avoir un rêve : m’affranchir de mes étoiles pour vous offrir une marque forte, symbole d’une identité singulière ».
La garantie d’instants partagés
D’où son idée de lancer « Precious time », sorte de marque chapeau avec une charte identitaire qui engage à l’« hospitalité », l’« authenticité » et la garantie d’« instants partagés ». « Ma seule ambition, c’est l’enchantement du client. Ce n’est pas qu’il parte satisfait, ça, c’est normal, c’est qu’il reparte en se disant qu’il s’est senti bien et a vécu un bon moment inoubliable, cela passe par la petite attention, la relation personnalisée, l’humour et… l’émotion ». Pour avoir des retours fiables, ils se méfient de certains sites où des internautes jugent des hôtels qu’ils ont fréquentés… ou pas. Il mise sur un module intégré au site web du Globe & Cecil. L’acquisition de l’Hôtel Simplon, un établissement 2 étoiles de 37 chambres, dans le quartier Perrache lui permet d’exploiter sa fibre sociale.
Un jour, il reçoit, via le CJD, une demande de recherche d’un local pour les Petites Cantines, cette association qui recrée du lien dans les quartiers en faisant cuisiner bénévolement des habitants pour nourrir d’autres habitants en situation précaire. Son auberge devient vite un espace d’Economie Sociale et Solidaire où le matin, une trentaine de personnes viennent prendre un petit déjeuner. « Un nouveau lieu de vie dans la ville » se réjouit cet entrepreneur bien ancré dans sa chère cité.