« La société de consommation de masse globalisée est arrivée au fond de l’impasse »

Pour l’économiste et philosophe Serge Latouche, la sobriété heureuse n’est pas un concept abstrait ; c’est un art de vivre. En rupture avec l’idéologie dominante qui exalte la consommation et la croissance économique, cette philosophie repose sur un retour à la simplicité.

« Trois ingrédients sont nécessaires pour que la société de consommation puisse poursuivre sa ronde diabolique : la publicité, qui crée le désir de consommer, le crédit, qui en donne les moyens, et l’obsolescence accélérée et programmée des produits, qui en renouvelle la nécessité. »[1] Dans nos sociétés modernes, nous sommes piégés dans une course effrénée à l’accumulation. Latouche nous invite à remettre en question cette logique. Pour lui, la véritable richesse réside non pas dans la quantité de biens que l’on possède, mais dans la qualité de vie. Utopie de bisounours ? Pas complètement : la voie pour transiter de l’avoir à l’être est celle de la décroissance rendue possible par une sobriété heureuse. « Cultiver son jardin, cuire son pain, faire ses yogourts, faire son marché et cuisiner soi-même, etc., peuvent être autant source de satisfaction personnelle et de plaisir pour les amateurs que des impératifs environnementaux ».[2]

Décroitre pour conjurer le spectre de l’effondrement

Au cœur de cette sobriété heureuse se trouve le respect profond de la nature et de ses limites. Dans un monde où la surconsommation menace la biodiversité et perturbe les équilibres écologiques, adopter un mode de vie sobre, c’est reconnaître que notre bien-être est intrinsèquement lié à celui de la planète. Il ne s’agit pas d’un retour en arrière, mais de la prise de conscience d’une évidence. « La société de consommation de masse globalisée est arrivée au fond de l’impasse. Elle repose, en effet, sur la croissance sans limite, qui est son essence même, alors que les données physiques, géologiques et biologiques lui interdisent de poursuivre dans cette voie en raison de la finitude de la planète. Le temps de l’effondrement est venu. Nous en percevons de nombreux signes avant-coureurs, même si nous refusons d’en accepter les conséquences et de prendre les mesures pour limiter les dégâts ou y porter remède… »[3] Si l’effondrement global ne semble pas à l’ordre du jour, nous sommes aujourd’hui confrontés à une multiplicité de micro-effondrements.


[1] Serge Latouche, Petit traité de la décroissance sereine, Mille et Une Nuits, 2007.

[2] Serge Latouche, Vers une société d’abondance frugale, Mille et Une Nuits, 2011.

[3] Serge Latouche, Sortir de la société de consommation, Les Liens qui Libèrent, 2010.

Crédit Photo : Pixabay – Pexels

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