A Saint-Germain-au-Mont-d’Or, près de Lyon, Thimonnier traverse les décennies en misant sur l’innovation. De la machine à coudre de Barthélémy Thimonnier en 1830 aux machines spéciales pour emballer des produits sensibles dans l’agroalimentaire ou le médical en 2021, l’entreprise industrielle dirigée par Sylvie Guinard mise sur l’innovation et la production locale.
« Quand nous vendons une machine, c’est pour 40 ans ! Alors il faut se renouveler en permanence. L’entreprise investit 10 à 15 % de son chiffre d’affaires annuel dans l’innovation avec une équipe en R&D de 35 personnes », dit Sylvie Guinard, présidente de Thimonnier. L’entreprise qui a réalisé 14,3 M€ de chiffre d’affaires en 2020, en croissance de 8 %, dispose d’un unique site de production en région lyonnaise.
Elle fabrique aujourd’hui des machines spéciales d’emballages souples pour des produits sensibles tels que des poches de solutions médicamenteuses ou des berlingots pour l’agroalimentaire. C’est après-guerre qu’une véritable politique d’innovations est lancée avec l’invention de la machine à soudure haute fréquence en 1947 et la première machine de conditionnement des berlingots d’eau de javel en 1952. En 1963, Thimonnier est à l’origine du Doypack®, le premier sachet tenant debout, imaginé par Louis Doyen, le dirigeant de l’époque. Depuis, l’entreprise multiplie les innovations dans les secteurs de l’agroalimentaire et du médical notamment. « Mon grand-père déposait beaucoup de brevets, aujourd’hui tombés dans le domaine public. Désormais, notre stratégie est plutôt l’avance technologique, sur des sujets stratégiques, que le dépôt de brevet », expose Sylvie Guinard. Sa présence mondiale, Thimonnier réalise 80 % de son chiffre d’affaires à l’international, nécessiterait des investissements en PI trop importants. « Difficile d’aller vérifier chez un non-client si la machine d’un concurrent présente des technologies inspirées des nôtres. » Alors Thimonnier innove, de façon incrémentale, pour sans cesse faire progresser ses machines et s’adapter au contexte.
Nouveaux enjeux numériques et environnementaux
Le numérique et l’environnement sont les deux sources d’innovation explorées par l’industriel. « L’écoconception a toujours été pratiquée chez Thimonnier, rappelle Sylvie Guinard. Aujourd’hui, nous accompagnons nos clients en proposant des machines qui permettent d’utiliser des contenants composés de nouveaux matériaux recyclables. La question des soudures ou de l’impression sur les sachets fabriqués avec ces nouveaux matériaux se pose. Notre équipe de R&D est là pour répondre à ces nouveaux enjeux. » La coopération avec les fabricants de matériaux est grande pour que toute la chaîne sache manipuler ces matières. Le développement d’un berlingot pouvant à la fois contenir un détergent et laisser passer un parfum a demandé près de cinq années de collaboration entre Thimonnier et son client. « Un premier prototype a été mis au point fin 2019, cite pour exemple Sylvie Guinard. Depuis, le fabricant de produits de lavage change progressivement toutes ses machines d’emballage dans le monde. Thimonnier lui fait du sur-mesure pour répondre à la technicité de son nouveau matériau. »
Le numérique est aussi entré chez l’industriel de Saint-Germain-au-Mont-d’Or pour « apporter une expérience d’utilisation optimisée », selon la dirigeante. Les machines d’emballage Thimonnier sont progressivement équipées de QRCode pour la maintenance prédictive, pour donner des informations de production supplémentaires… « La réalité augmentée contribue à fournir davantage d’informations. »
Si l’industrie du futur est digitalisée et robotisée, elle est aussi responsable socialement. Un enjeu que Sylvie Guinard ne perd jamais de vue.
Industriel responsable
« Notre fibre éco-sociéto-responsable n’est pas nouvelle. Nos machines d’emballage sont écoconçues pour consommer le moins possible d’eau et d’énergie. Et les emballages souples sont une solution sécure quand il est absolument nécessaire d’emballer. Tout ne peut pas être en vrac. Le lait ou les solutions médicamenteuses ne peuvent pas se passer d’emballage. Nous contribuons ainsi, en étant un acteur industriel responsable, à nourrir, soigner et accompagner les populations », affirme la dirigeante.
Sylvie Guinard a pris les rênes de l’entreprise en 2009, après y être entrée en 2002 tout d’abord comme chef de projets, puis directrice technique et directrice générale adjointe et financière. Elle est la 5e génération à sa tête. Cette ingénieure en mécanique qui se rêvait spationaute a trouvé un nouveau terrain de jeux dans l’entrepreneuriat et le monde de l’industrie pour lequel elle s’est engagée dans différentes fonctions. Rapidement, elle met ses compétences au service des organisations professionnelles. A partir de 2011, elle sera membre du comité de direction du Symop (organisation professionnelle des fabricants et importateurs de machines et de technologies de production), membre du conseil d’administration du Cetim (Centre technique des industries mécaniques) et membre du comité de direction de la Fim (Fédération des industries mécaniques). « Ces différents mandats m’ont permis de m’impliquer sur le sujet de l’industrie du futur », dit-elle.
Depuis 2019, ses engagements se sont tournés vers des sujets plus transversaux parfaitement maîtrisés par Thimonnier : l’international et l’innovation. Elle a été nommée présidente du conseil d’administration de l’Inpi (Institut national de la propriété industrielle) pour « apporter mon expérience pragmatique en matière d’innovation et aider à démocratiser la PI auprès des PME françaises ». Dans un même temps, Sylvie Guinard a été nommée administratrice de Business France, le bras armé du gouvernement pour aider au développement international des entreprises françaises et faciliter la venue d’investisseurs étrangers sur le territoire national. « J’apporte un éclairage de PME industrielle opérationnelle dans différentes zones géographiques. Je fais les salons internationaux et j’amène des retours très terrains pour contribuer à imaginer des outils et des accompagnements utiles pour les entreprises. »