Pionnière dans son domaine, cette PME co-dirigée par deux amis, l’un marseillais l’autre parisien, propose solutions de communication et autres emballages en papier ensemencé. Un produit qui a su trouver son marché, puisqu’elle a enregistré une croissance à deux chiffres en 2020, en dépit des deux mois de confinement. A la faveur de quelle stratégie ?
C’est dans l’air du temps, on offre de nos jours une deuxième vie à tout support, et le papier n’échappe pas à la règle. Recyclé, voire même upcyclé, ce dernier peut faire partie intégrante d’une stratégie zéro déchet… parfois de façon plutôt poétique, en tout cas, c’est celle mise en exergue par l’entreprise Nateva Communication, pionnière dans son domaine. Son cœur de métier ? Proposer des supports, du flyer au calendrier en passant par l’étiquette, à base de papier compostable et biodégradable, contenant une multitude de graines. Fleurs mellifères, plantes aromatiques, fruits et autres légumes, elles sont choisies pour préserver la biodiversité, le tout sans OGM. Ainsi, lorsque ce support n’a plus lieu d’être, au lieu de le jeter à la poubelle ou de l’oublier dans un tiroir, on le mouille, on le plante, on l’arrose… et quelques jours plus tard, la nature fait son œuvre.
Le déclic à l’origine de cette activité originale, c’est le Parisien Franck Bansart qui va l’avoir lors de la rencontre d’un papetier, maître dans l’art de ce procédé de fabrication. « Franck dirigeait Nateva, il conseillait ses clients sur leur positionnement en matière de développement durable, ce dès 2009 », alors que l’éco-responsabilité n’était pas encore vraiment sous les feux des projecteurs, raconte son associé marseillais Serge Kohlmann. « Et il s’intéresse donc à la capacité de cette solution à apporter non seulement du contenu, mais aussi du contenant, à se trouver en cohérence sur les paroles et les actes ».
Croissance à deux chiffres
La marque Papier Ensemencé est créée dès 2016, elle verra se rallier sous son égide, fin 2019, Serge Kohlmann, auparavant cadre dirigeant dans un cabinet international de conseils RH et mu par la volonté de « vivre un challenge, mais aussi une belle aventure humaine ». Ensemble, les deux amis de toujours codirigent la structure depuis lors, dans la complémentarité. « Franck c’est l’expert, le créatif, tandis que j’officie sur la partie organisation, développement, marketing, communication… » L’entreprise avait déjà entamé une première diversification en termes de cibles en adressant, outre le B to B, le marché des particuliers dès 2018, avec la marque PapierFleur, proposant faire-part, cartes de vœux, cadeaux divers. Mais 2020 voit Nateva entrer dans une phase encore plus offensive sur le plan commercial. Avec des résultats probants, puisqu’elle enregistre l’an dernier une croissance à deux chiffres et un CA de 900 k€, ce malgré les deux mois de confinement et l’arrêt total des activités événementielles. En ayant vendu 1,2 million de supports, ce qui représente l’équivalent de quatre hectares de fleurs sauvages à replanter. « Nous avons recréé deux nouveaux sites, mis en place un CRM plus puissant, retravaillé l’offre… » L’entreprise multiple également les canaux de distribution, outre ses e-shop : ses gammes sont vendues sur d’autres maketplaces, avec lesquelles des accords ont été conclus. Mais aussi pour la gamme B to C, en physique chez des fleuristes, libraires et autres carteries. Soit une cinquantaine de points de vente.
Pour autant, la marge de manœuvre commerciale est encore vaste. « Ceux qui sont déjà clients voient l’intérêt de ce produit-là. Tandis qu’avec ceux qui ne l’achètent pas encore et le découvrent, il y a toujours un effet “waouh” ». Et pour défricher ce champ des possibles, l’équipe tisse des liens étroits avec le monde économique. « On travaille avec les entreprises en définissant comment les accompagner sur le long terme. Non pas pour remplacer totalement leur papier, mais pour leur apporter des solutions sur les trois à quatre temps forts de communication qui jalonnent leur année ».
Un atelier créatif pour la R&D
La PME multiplie également les projets. Ainsi la réflexion est lancée pour relocaliser la production de la matière première, à savoir ce papier ensemencé, qui ne se fabrique pas encore sur l’Hexagone. Pour l’heure, « on a un certain nombre de prestataires avec lesquels on a des accords d’exclusivité dans notre pays ». Ce sont des papetiers soit frontaliers avec l’Europe, soit basés en Amérique du Nord. Tous ces acteurs sont labellisés ou certifiés B Corp. « Car nous ne voulons pas œuvrer avec des industriels qui ne sont pas transparents sur les conditions de travail et de fabrication ». A terme, l’intégralité de la chaîne de valeurs devrait se trouver sur le territoire tricolore. Dans l’attente, la matière première est tout au moins transformée en France, de façon artisanale dans les locaux de l’entreprise. « Ce sont nous qui imaginons des solutions pour nos clients, concevons et fabriquons les supports ». Et si dans cette PME de 9 salariés aujourd’hui (contre deux il y a un an), on ne compte pas à proprement parler de département R&D, les deux associés ont mis en place « une organisation rapide, flexible, à savoir un atelier créatif avec nos collaborateurs. Ensemble, nous regardons chaque mois quelles sont les nouveautés, les demandes émergentes, on étudie les évolutions du marché… » C’est dans ce cadre qu’a été développée cette année une approche bi-matière, puisqu’outre le papier ensemencé, l’entreprise propose désormais aussi des supports en papier upcyclé, fabriqué à base de déchets organiques de l’industrie agroalimentaire (maïs, kiwi, olives, agrumes…). Là encore, la matière première est produite par un prestataire et transformée dans les locaux de la PME.
Garder le juste prix
Innover : c’est la clé du renforcement de la croissance, dans un marché certes toujours en développement, mais de plus en plus concurrentiel. Ainsi pour garder son avance, Nateva, qui compte déjà 30 références produits à décliner via ses deux marques, se renouvelle donc en permanence, en appui avec les acteurs économiques. « Nous sommes en train de développer pour le monde du vin des collerettes de bouteille en papier ensemencé ». L’entreprise souhaite par ailleurs nouer des collaborations avec des start-ups, « afin qu’elles puissent apporter leur contribution à une dynamique propre à créer des produits encore plus intégrés à la vie écoresponsable. L’idée, c’est de travailler avec les structures sur lesquelles il y a des complémentarités de produits, pour proposer une gamme complète aux clients ». Sur le registre du BtoC, la PME commence à se positionner sur les objets de décoration. « Nous avons par exemple imaginé des cadres, illustrés par des créateurs sur du papier ensemencé ».
Enfin, outre l’innovation, les deux associés tiennent à ce que leurs produits soient proposés au juste prix. « Dans notre réflexion, on ne veut pas que le développement durable soit inabordable. Il faut faire en sorte qu’une petite entreprise ou un particulier soit capable, parce qu’il aime ce produit, parce qu’il correspond à ses valeurs, de l’acquérir. Donc on travaille également en permanence cette question ».