L’intelligence artificielle, tout le monde connaît en théorie, mais les PME ont tendance à penser que ce n’est par pour elles. Erreur, selon François Dineur, associé Absoluce, pour qui l’intelligence artificielle n’est pas réservée aux grands groupes et peut permettre aux PME, lorsque le projet est bien pensé, de faire évoluer leur stratégie et de se démarquer.
L’intelligence artificielle ne remplacera jamais l’homme. Elle permet de lui « mâcher le travail » en réussissant à compiler et à trier des données, en lui fournissant un « brouillon » qui aidera le manager à prendre la bonne décision.
Le robot est has been, vive le cobot !
L’affirmation est un peu rapide. Les robots, qui permettent de réaliser une tâche répétitive, sont indispensables dans le secteur industriel. Mais selon John Rauscher, entrepreneur et conférencier expert de l’intelligence artificielle, l’avenir est aux cobots. Le terme Cobot, collaborative robot en anglais, est la compilation de ces deux mots. L’idée est que les ordinateurs calculent, mais ne raisonnent pas. Ils ne remplaceront jamais le cerveau humain qui, lui, est seul capable de bon sens, de communication et de créativité. Autre différence fondamentale : les robots sont monodisciplinaires : un robot capable de jouer aux échecs est programmé d’une manière totalement différente d’un robot capable de jouer au jeu de go. Ils peuvent, au mieux, communiquer entre eux, mais pas se synchroniser. Seul le cerveau humain est pluridisciplinaire. Ce que l’on nomme l’intelligence artificielle générale (AGI en anglais) serait la capacité d’une machine à comprendre et apprendre n’importe quelle tâche intellectuelle qu’un être humain peut réaliser. Nous en sommes très loin et selon John Rauscher, même si de nombreux chercheurs s’y intéressent aujourd’hui, elle ne serait pas opérationnelle avant la fin du siècle.
L’avenir est à la collaboration entre l’homme et la machine
Les robots sont en quelque sorte des sous-traitants. Le cobot, lui, permet une véritable collaboration entre l’homme et la machine. En effet, l’intelligence artificielle permet désormais non seulement de traiter des données descriptives (« 80 % de nos clients ont moins de 30 ans »), mais également des données d’usage (« 50 % de nos clients achètent nos produits après être resté plus de 10 minutes en magasin et après avoir consulté notre site deux fois »). Ces données d’usage vont être, et sont déjà, une ressource précieuse pour notre siècle. Par exemple, l’efficacité d’un commercial peut être démultipliée grâce à tous les éléments que son « cobot » lui permet de connaître sur son client. Mais la relation humaine entre le commercial et l’acheteur potentiel, la communication entre eux, l’empathie, restent l’apanage du cerveau humain.
Dans quels domaines les PME peuvent-elles utiliser l’IA ?
De la simple « sous-traitance » d’une tâche confiée à un robot à la collaboration avec un cobot, le spectre d’utilisations est large, y compris dans les sociétés de service, à l’instar de cette start-up qui propose des analyses de jurisprudence aux avocats, leur permettant ainsi d’anticiper leurs chances de succès ou d’échec selon le type de dossiers qu’ils plaident.
Voici quelques exemples d’application pour les entreprises :
- mettre en place un marketing one to one. Cela peut être des propositions de réponses type à des mails contenant certains mots, réponses pouvant ensuite être peaufinées par l’humain, ou un chat pour répondre aux questions les plus courantes,
- proposer un service premium, la chaîne de conception et de fabrication d’un produit ou d’un service pouvant être individualisé,
- à l’inverse, développer une offre low-cost.
A noter que l’utilisation bien pensée de l’IA dans une PME doit faire partie intégrante de la stratégie et permettre de développer la marque. On peut également supposer que c’est l’utilisation d’un ou plusieurs cobots qui donnera de la valeur à l’entreprise dans les années à venir.
L’impact de l’IA sur le management de l’entreprise
L’intelligence artificielle ne supprime pas les emplois, elles les modifient. Un chef de service qui était l’expert métier va devoir savoir s’appuyer sur les cobots et les utiliser au mieux. L’importance croissante accordée lors des recrutements aux soft skills est révélateur de cette très forte tendance selon laquelle les salariés doivent certes connaître la technique, mais surtout apporter de la valeur ajoutée aux processus et aux relations humaines.
6 étapes pour démarrer un projet d’IA dans la PME
- Réfléchir à quelle utilisation pourrait servir l’IA, et ce qui motivera le plus les salariés.
- En management, éviter de parler d’IA (le terme peut faire peur, car les salariés auront toujours tendance à penser que c’est disproportionné par rapport à la taille de leur entreprise), mais parler de « faire quelque chose qui n’a jamais été fait », d’expérimentation.
- Auditer les données disponibles. Dans les PME, généralement, dans ce domaine le bât blesse… C’est une bonne occasion de faire le point, de réfléchir au besoin, pour en faire quoi, puis comment s’organiser, à l’avenir pour récolter des données utiles, prérequis à tout déploiement de projets d’IA.
- Trouver un « sachant » en interne ou sélectionner un consultant.
- Déterminer la technologie la plus adaptée : solution à créer, solution existante permettant de compléter avec un développement sur mesure, solution open source… Attention à vérifier la pérennité de la technologie.
- S’organiser, comme pour tout projet, en gestion de projet : planifier, budgéter, déléguer, contrôler, réorienter, tester, déployer, faire évoluer.
Pour François Dineur : « Toutes les PME devraient entamer une réflexion sur la manière dont l’intelligence artificielle pourrait leur permettre de créer davantage de valeur ajoutée. Le ticket d’entrée est de l’ordre de 10 000 euros. Cela permet à une PME de tester un outil et de vérifier son adéquation avec le besoin. A un deuxième niveau, mais là, il faut un certain volume de données, une solution d’IA de très bonne qualité nécessite un investissement de 40 à 50 000 euros. Ce n’est pas négligeable, mais cela reste abordable. »