Le temps est au catastrophisme et à l’émotionnel. Les médias annoncent un septembre noir avec une progression sans précédent des faillites et du chômage sur fond de deuxième vague du virus. Face au déferlement de mauvaises nouvelles, la tentation est soit de prendre du bon temps, soit de se claquemurer.
En économie, la peur est, selon le dicton, mauvaise conseillère. La dictature de l’actualité est par nature auto-réalisatrice. Les mauvaises nouvelles en flot continu créent et amplifient la crise. Face au péril préannoncé, la prise de risque s’apparente à un acte de suicide. Les entreprises, les ménages n’ont guère envie d’investir ni de s’engager.
Consommation versus investissement
La covid-19 accroît l’aversion aux risques déjà bien présente depuis la crise financière de 2008. Le mouvement des gilets jaunes et les grèves provoquées par la réforme des retraites avaient déjà contribué à son exacerbation. La progression du taux d’épargne est l’un des signes de ce haut niveau d’anxiété. Il était passé de 13,7 à 15,5 % du revenu disponible brut du début 2018 à fin 2019 pour atteindre près de 30 % durant le confinement. Entre mars et juin, le surcroît d’épargne est évalué entre 75 et 100 milliards d’euros. Les dépôts à vue dépassent 430 milliards d’euros, contre moins de 200 milliards d’euros en 2007. L’aversion aux risques fait le bonheur du Livret A et de l’immobilier qui joue toujours son rôle de valeur refuge.
Si la consommation courante semble reprendre les couleurs, il en va tout différemment pour l’investissement. Les actifs éprouvent des difficultés à retrouver le chemin du travail. Implicitement, les vacances apparaissent un havre avant d’affronter les frimas de l’automne. Les craintes sanitaires et professionnelles incitent les uns et les autres au repli. En déclarant, dès le début du déconfinement, que les Français pourraient partir en vacances, les pouvoirs publics ont semblé donner le la en la matière. Les vacances deviennent ainsi une échappatoire tout en permettant d’aider un secteur touristique en grande difficulté.
Résister à la peur
Pour contrarier l’anxiété paralysante, pour espérer le dégonflement de la poche d’épargne de précaution, le discours du gouvernement se doit d’être positif. Certes, il ne faut pas nier la réalité de la situation, mais prendre conscience que les économies modernes sont des systèmes complexes d’échanges de biens, de services, de capitaux et d’informations, avec des interdépendances croisées. Un léger grippage se diffuse, grâce au digital, en temps réel à tous les acteurs autour de la planète. Pour éviter une implosion généralisée, les messages sont aussi importants que les flots de milliards déversés depuis des semaines, que ce soit par les Etats ou les banques centrales.
La résurgence de la covid-19 prouve que la résilience des différentes nations risque d’être mise à dure épreuve dans les prochains mois. Elles devront éviter le pessimisme, l’attentisme, le repli et la panique. L’épidémie de choléra de 1832 après un effet de stupeur n’avait pas empêché la France d’entrer dans l’ère industrielle ; elle dura pourtant durant plusieurs années…