Bonne nouvelle ! Les tentatives des politiques ou autres patrons de presse pour cacher une information préjudiciables sont vouées – pour la plupart – à l’échec.
En 2003, le millionnaire et militant écologiste Ken Adelman shoote le littoral californien pour en montrer l’érosion. Il prend ainsi près de 12 000 clichés de propriétés, dont celle, somptueuse, de la star hollywoodienne Barbara Streisand. L’image sera publiée sur le site pictotpia.com. Barbara Streisand saisit alors la justice, réclame 10 millions de dollars et cherche à faire supprimer le cliché. C’est alors que l’affaire prend une tout autre tournure. La médiatisation de l’affaire provoque la propagation rapide de l’image en question. Plus de 420 000 internautes la visionneront le mois suivant. La diffusion de la photo devient virale.
Barbara Streisand peut être fière. Elle vient malgré elle de donner son nom à un phénomène de communication assez courant. On parle désormais d’« effet Streisand » quand censurer une information provoque l’effet inverse. Comme un pompier pyromane qui nourrit le feu qu’il veut éteindre. Les exemples sont nombreux. Vincent Bolloré aurait voulu censurer un documentaire sur Canal+ qui concernait le Crédit Mutuel et la fraude fiscale. Tôlé qui donna au documentaire une très large publicité.
Le sociologue Gérald Bronner explique les mécanismes de l’effet Streisand. « En réalité, c’est précisément le caractère concurrentiel du marché cognitif qui rend la censure si risquée »[1]. Le sensationnalisme fait recette ! Sur un marché cognitif extrêmement concurrentiel, dans la lutte pour capter une partie de notre temps de cerveau disponible, divulguer une information qu’on cherche à cacher s’avère un bon produit. Tous les ingrédients sont présents pour retenir notre attention : implication d’une célébrité ou d’une personne puissante, malveillance, accès à un élément de la vie privée…
[1] Bronner, Gérald. Apocalypse cognitive, Presses Universitaires de France, 2021.
Crédit Photo : Can Stock Photo – labamba