Les formations de développement personnel font florès. Chacun fait son marché, selon ses goûts, ses appétits, ses curiosités. En quoi cependant une telle formation peut-elle nous servir en tant que chef d’entreprise et en quoi elle peut être utile pour l’entreprise elle-même ?
Disons d’abord que j’écris depuis la position de quelqu’un qui anime des stages de développement personnel. Sur l’envie d’entreprendre au sens large, sur le conflit, sur le développement de sa capacité d’ajustement face aux situations. Je ne suis donc pas bien placé pour dire quelle formation est utile et quelle formation ne l’est pas car on pourrait à bon droit me reprocher d’être juge et partie.
Cette précaution étant exprimée, j’expose ici ma vision du sujet, en ouvrant le champ de la réflexion.
Le programme Copernic du CJD nous enseigne qu’un chef d’entreprise est un dirigeant-entrepreneur. Le dirigeant qui gère, produit, fait fonctionner l’entreprise ; l’entrepreneur qui explore, invente, cherche le cap. Le dirigeant qui s’occupe du présent, l’entrepreneur qui s’occupe de l’avenir. Le premier fournissant au deuxième les moyens de son exploration, le deuxième construisant le futur de l’entreprise.
C’est à l’aune de cette distinction et des qualités inhérentes à chacune des deux postures que chacun peut évaluer l’importance d’une formation, qu’il s’agisse de formation technique ou de développement personnel, pour l’exercice de sa fonction.
Les qualités du dirigeant
Le dirigeant est d’abord quelqu’un qui gère et affecte les ressources de l’entreprise – et les siennes en particulier. La gestion du temps, la gestion de l’argent, la gestion de l’engagement personnel de chacun et de lui-même. Cette gestion se fait dans un cadre qu’il lui incombe de poser, en collaboration avec les parties prenantes, et de faire respecter.
Aussi les sujets suivants, sans souci excessif d’exhaustivité, sont-ils pertinents :
Gestion du temps : gérer pratiquement son temps, apprendre à prioriser et donc connaître ses propres priorités, connaître les mouvements existentiels qui, au fond de notre âme, colorent ces priorités ;
Gestion de l’argent : éclaircir son rapport à l’argent, ce qu’il représente et nos croyances à son sujet ; négocier, engager et gérer des conflits ;
Gestion de l’engagement : connaître ses limites et en tenir compte, voire repousser ces limites en accroissant ses ressources. L’activité physique, la découverte de ses émotions, le développement de ses connaissances en sont trois exemples sur les plans corporel, émotionnel et cognitif. Mais aussi savoir écouter l’autre pour prendre conscience ensemble de ses ressources (ce qui suppose de s’écouter soi : « « Il faut écouter l’autre; mais il faut surtout s’écouter soi car, si on ne s’écoute pas, on ne peut pas entendre ce que nous dit l’autre. », dit Antony de Mello.
Poser le cadre : écouter l’autre et ses besoins, à nouveau, s’écouter soi toujours et faire preuve d’autorité. Oser la sanction.
Les qualités de l’entrepreneur
L’entrepreneur invente en permanence le futur de l’entreprise. Il explore, cherche, flaire. Il trouve des pistes mais il y renonce souvent ; il essaye mais critique ; il se passionne mais doute en permanence.
Il a quelque chose du scientifique qui aborde avec humilité les mystères du monde, ne refuse aucune piste mais se montre impitoyable vis-à-vis des théories qu’il élabore lui-même.
Explorer : accepter l’incertitude et être capable de laisser émerger des solutions nouvelles. Lâcher les certitudes et accepter de ne pas savoir.
Trouver : être créatif, inventif, s’autoriser un pas de côté et à imaginer ce qui n’a jamais été tenté ou ce qui a échoué dans le passé.
Renoncer : traiter avec rigueur toute piste qui prend forme puisqu’il ne faut pas emmener l’entreprise dans une impasse. Mettre les solutions à l’épreuve du réel.
Sans doute manque-t-il des paragraphes dans ces deux chapitres. À chacun de les écrire, en faisant avec sa formation ce qu’il fait avec sa propre entreprise : l’inventer, la mettre à l’épreuve du réel, la gérer.
Laurent Quivogne – http://www.lqc.fr/
Laurent Quivogne