Au cœur de l’Analyse Transactionnelle (AT), théorie psychothérapeutique conceptualisée par Eric Berne au milieu du XXe siècle, réside un ensemble de concepts clarifiant notre compréhension des comportements humains. L’un de ces concepts, nommé la « collection de timbres », mérite une attention particulière pour sa subtilité.
Dans le cadre de l’AT, la « collection de timbres » n’évoque pas l’activité paisible du philatéliste, mais plutôt le processus d’accumulation de frustrations, de griefs ou d’incidents mineurs par un individu. On nomme timbre psychologique une émotion stockée pour un usage ultérieur. Ces « timbres », symboles de ressentiments non exprimés, s’accumulent jusqu’à atteindre un seuil de tolérance, à partir duquel ils se déversent dans une réaction émotionnelle intense, souvent disproportionnée par rapport à la situation déclenchante.
Une situation assez courante : Pierre, un employé dévoué et irréprochable, reste silencieux face à des remarques dévalorisantes de la part de son manager, les considérant comme des « timbres » qu’il accumule. Au fil du temps, ces frustrations s’accumulent. Pierre encaisse sans broncher. Et puis un jour, Pierre explose de colère lors d’une réunion sur un sujet anodin. Ses collègues s’en étonnent. Pierre vient d’échanger sa « collection de timbres ».
Dans ce contexte, la « collection de timbres » peut être interprétée comme une forme de communication passive-agressive, où les conflits ne sont pas gérés immédiatement, mais stockés pour être libérés plus tard, dans un contexte souvent inapproprié.
Reconnaître cette tendance
L’AT considère ce phénomène dans une perspective plus large, en relation avec d’autres concepts comme les « états du moi » (Parent, Adulte, Enfant) et les « transactions ». Un individu s’identifiant à un « état du moi Enfant » pourrait être plus susceptible d’accumuler des « timbres », faute de moyens pour exprimer et gérer les conflits. À l’inverse, un « état du moi Adulte » favorise une gestion plus rationnelle des conflits, limitant ainsi l’accumulation de « timbres ».
La première étape pour cesser de « collectionner des timbres » est de reconnaître cette tendance chez soi. Cela peut impliquer de réfléchir aux moments où des réactions disproportionnées à des situations apparaissent et d’identifier si ces réactions peuvent être le résultat de l’accumulation de griefs non exprimés. En prenant conscience de cette dynamique, les individus peuvent apprendre à repérer leur propension à « collectionner des timbres » et développer des stratégies pour exprimer leurs sentiments et résoudre leurs conflits de manière plus constructive. Ainsi, il est crucial d’apprendre des techniques de gestion des conflits, comme la Communication Non Violente (CNV) ou l’assertivité, pour savoir s’affirmer sainement.
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