Le plus sûr moyen de développer le sentiment d’avoir raison ou de ne pas avoir de problèmes, c’est assurément de faire comme tout le monde.
1984, le célèbre et terrifiant roman d’anticipation de George Orwell, dépeint un pays totalitaire, Oceania, dans lequel l’emprise de l’État sur les esprits est totale. Toute tentative de s’en délivrer pour accéder à un début de réflexion personnelle s’avère désespérée. Le héros l’apprendra à ses dépens.
Les sujets de ce pays savent, contre toute évidence, que 2 + 2 = 5. Personne n’ose remettre en cause cette erreur béante. Pourquoi une telle acceptation ? Il y a bien sûr la peur de transgresser une vérité officielle. Mais plus profondément, avant la peur, le conformisme explique cette adhésion folle à une contre-vérité flagrante. Quand tout le monde pense que 2 + 2 = 5, alors vous pensez que 2 + 2 = 5.
Le biais de conformisme agit puissamment chez nous. Le phénomène du panurgisme n’a pas été découvert hier, mais le psychologue américain Solomon Asch en a réellement démontré l’ampleur en 1951 lors d’une expérience devenue célèbre (voir vidéo).
En dépit de ce que nous discernons clairement et distinctement, nous préférons nous rallier à l’avis du groupe. Parce que nous croyons qu’il a raison et que nous nous trompons ; ce que dit le groupe nous convainc. Ou bien pour ne pas rompre l’unanimité, pour ne pas prendre le risque de passer pour un déviant et de se mettre le groupe à dos. C’est ce qu’on appelle la conformité normative.
Le biais de conformisme nous fait tomber dans des travers franchement comiques. Comiques, mais aussi franchement inquiétants. Quand un individu développe un comportement absurde par conformisme, il peut le conserver quand le groupe n’est plus présent. Pire : à l’image d’un virus, il transmet ce comportement à d’autres individus « sains » (voir vidéo).
Une expérience qui n’est pas sans nous rappeler la parabole des chimpanzés, nos cousins qui nous ressemblent tant.
Crédit Photo : Can Stock Photo – muha04