La culture organisationnelle définit l’identité d’une organisation. Pour comprendre la complexité que cette notion embarque avec elle, référons-nous aux travaux d’Edgar Schein, professeur émérite au MIT Sloan School of Management.
Schein est reconnu pour ses contributions significatives à la théorie et à la pratique de la culture organisationnelle, qu’il définit comme « un ensemble de postulats de base, inventés, découverts ou développés par un groupe cherchant à faire face à des problèmes d’adaptation externe ou d’intégration interne, qui ont largement été vérifiés pour être considérés comme valides et transmis aux nouveaux membres comme les façons correctes de penser et d’agir face aux problèmes ».
Shein distingue trois niveaux distincts — les artefacts et comportements, les valeurs adoptées et les hypothèses fondamentales — permettant de décrypter en profondeur la culture d’une organisation.
Les artefacts et comportements
Les artefacts représentent le niveau le plus superficiel, mais le plus visible de la culture organisationnelle. Ils comprennent les objets physiques, les comportements observables et les produits tangibles qui caractérisent une entreprise. Ce sont « les choses que l’on peut voir, entendre et ressentir lorsqu’on rencontre une nouvelle culture ». Par exemple, chez Google, les artefacts incluent des espaces de travail ouverts et flexibles, des salles de repos équipées de jeux vidéo, et des murs décorés de graphismes colorés. Ces éléments reflètent une culture de l’innovation et de la créativité.
De même, Apple expose des prototypes et des produits innovants dans ses bureaux, soulignant son engagement envers le design et l’excellence technologique. Les artefacts sont facilement observables, mais ne suffisent pas à expliquer les raisons profondes des comportements observés.
Les valeurs adoptées
Les valeurs adoptées constituent le deuxième niveau de la culture organisationnelle. Elles sont les normes, croyances et règles que les membres d’une organisation estiment importantes et qui guident leurs actions. Elles façonnent les comportements et les choix.
Chez Google, par exemple, la valeur de l’innovation se manifeste par des programmes tels que les fameux « 20 % time » où les employés peuvent consacrer une partie de leur temps de travail à des projets personnels innovants. Zappos, un leader du commerce de détail en ligne, valorise fortement la satisfaction client et l’empathie, ce qui se traduit par une politique de service client qui se veut exceptionnel et par une culture d’entreprise centrée sur le bien-être des employés.
Ces valeurs adoptées influencent les comportements et décisions au sein de l’organisation, mais elles restent dans les faits trop souvent déclaratifs.
Les hypothèses fondamentales
Les hypothèses fondamentales quant à elles représentent le niveau le plus profond et inconscient de la culture organisationnelle. Elles sont les croyances profondément enracinées, les postulats qui façonnent la manière dont les membres perçoivent le monde et réagissent aux situations.
Chez Toyota, par exemple, une hypothèse fondamentale pourrait être la conviction que l’amélioration continue est essentielle à la réussite. Cette croyance guide les décisions stratégiques et oriente les processus de production de l’entreprise, notamment à travers le système de production Toyota (TPS), connu pour son approche Lean. Une autre hypothèse chez Patagonia pourrait être la croyance en la nécessité de la durabilité environnementale, influençant ainsi toutes les actions de l’entreprise, de la conception de produits à la politique de supply chain. Ces hypothèses sont rarement questionnées et agissent comme des postulats tacites qui orientent toutes les actions et décisions de l’organisation.
Comprendre, c’est déjà agir. En décryptant la culture d’une entreprise à l’aide de cette grille de lecture, les managers disposent de leviers permettant de mettre en place des stratégies efficaces pour renforcer ou transformer la culture de leur organisation.
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