Le biais d’extraordinaireté renvoie à un phénomène psychologique où les individus ont tendance à surestimer la probabilité d’événements extraordinaires ou remarquables, au détriment de ceux plus ordinaires ou communs. Ce biais affecte la manière dont nous percevons les risques ou évaluons les personnes.
Prenons un exemple concret : lorsqu’un avion s’écrase, cet événement tragique reçoit une couverture médiatique intense, laissant une impression marquante sur le public. En conséquence, certaines personnes peuvent surestimer le risque de voyager en avion, bien que statistiquement, il soit beaucoup plus sûr que d’autres modes de transport, comme la voiture. Cette surestimation des événements rares mais dramatiques est une manifestation du biais d’extraordinaireté.
Mais ce biais peut s’exprimer autrement. Dans l’exemple que nous venons d’examiner, c’est l’intensité de la couverture médiatique de l’événement et sa dimension dramatique qui nous trompent. Mais l’extraordinaireté peut agir en nous, sur nous plus directement. Cela peut être le cas dans un contexte de recrutement. Le biais d’extraordinaireté peut en effet conduire les recruteurs à accorder plus de crédit à un candidat possédant une caractéristique exceptionnelle, souvent au détriment de compétences plus pertinentes pour le poste. Par exemple, un candidat ayant des passe-temps atypiques ou des « mad skills » peut sembler plus attrayant, même si ces compétences ne sont pas directement liées au travail en question. Les « mad skills » sont des compétences inhabituelles ou exceptionnelles acquises à travers des hobbies ou des passions. Elles peuvent conduire les recruteurs à considérer que ces talents ou expériences uniques peuvent être un véritable atout pour leur entreprise.
Imaginons un candidat qui, malgré son jeune âge, a déjà fait un tour du monde et traversé les cinq continents. Cette expérience rare pourrait amener le recruteur à penser que ce candidat possède une grande adaptabilité, une capacité à interagir avec différentes cultures, un esprit d’initiative particulièrement développé, etc. Bien que ces qualités supposées ne soient pas directement liées à la bonne tenue du poste vacant (par exemple un poste de comptable), le recruteur peut leur accorder une importance excessive et faire pencher la balance en faveur de ce candidat qui sort du lot.
Pour contrer ce biais, la première chose à faire est — comme pour tout biais cognitif — de savoir qu’il existe et que nous en sommes les victimes. Cette simple prise de conscience agit déjà comme une prise de recul. Ensuite, il importe de lister les compétences et qualités nécessaires pour tenir le poste et de s’efforcer d’évaluer le candidat uniquement à l’aune de celles-ci. Enfin, recruter à plusieurs permet de réduire l’impact de ce biais, d’en relativiser la portée en confrontant les différents points de vue et évaluations.
Crédit photo : Cristi Ursea – Unsplash