S’il y a bien un facteur qui peut amener un salarié à quitter l’entreprise ou à se désinvestir, c’est bien le sentiment d’injustice. La recherche de la justice organisationnelle, qui se réfère à la perception des employés sur l’équité des pratiques, procédures, décisions et relations au sein de leur organisation, doit donc être considérée comme une priorité pour le management. Mais sur quels piliers cette justice repose-t-elle ? Voici les trois points sur lesquels travailler pour la rendre palpable auprès des salariés ?
1 — La justice distributive
Basée sur la théorie de l’équité développée par J. Stacy Adams en 1965[1], cette forme de justice se concentre sur la perception des employés de l’équité dans la distribution des ressources et des récompenses, telles que les salaires, les promotions, et les avantages. Pour évaluer cette équité, les employés comparent leur ratio effort/récompense à celui des autres.
Prenons un exemple. Une entreprise décide d’augmenter les salaires basés sur les performances individuelles et l’ancienneté. Les employés ayant des performances élevées et plusieurs années d’expérience reçoivent des augmentations significatives, tandis que ceux avec des performances moindres ou moins d’expérience reçoivent des augmentations plus modestes. Les employés évaluent cette répartition des augmentations en termes d’équité : ceux qui perçoivent une juste récompense pour leurs efforts et leur contribution à l’entreprise ressentiront une perception positive de la justice distributive.
2 — La justice procédurale
La justice procédurale se focalise sur la manière dont les décisions sont prises au sein de l’organisation. Selon John Thibaut et Laurens Walker[2], cette forme de justice est perçue comme élevée lorsque les processus de prise de décision sont cohérents, impartiaux, transparents, et prennent en compte les opinions des employés.
Reprenons le cas de notre entreprise. Avant de mettre en place ce nouveau système de rémunération, la direction consulte les employés, sollicite leurs retours et opinions, et explique clairement les critères utilisés pour déterminer les augmentations. Cette transparence et cette implication des employés dans le processus de décision renforcent leur perception de la justice procédurale. Ils sont plus enclins à percevoir le processus comme équitable, même s’ils ne sont pas entièrement satisfaits de l’issue.
3 — La justice interactionnelle
Introduite par Robert J. Bies et Joseph S. Moag[3], la justice interactionnelle se concentre sur la qualité des interactions et de la communication dans le cadre des processus organisationnels, en particulier lors des prises de décision. Cela inclut le respect, la dignité, et la courtoisie.
Dans notre exemple, les managers prennent le temps de rencontrer individuellement chaque employé lors de la communication des nouvelles rémunérations. Ils expliquent de manière respectueuse et détaillée comment chaque augmentation a été déterminée et répondent à toutes les questions, en faisant preuve de considération. Cette approche améliore la perception des employés de la justice interactionnelle.
Pratiques, processus de décision, interactions… Le fond et la forme, le « quoi » et le « comment ». Pour garantir l’équité au sein des organisations, il importe d’agir conjointement sur ces dimensions.
[1] Adams, J. S. (1965). Inequity in social exchange. Advances in Experimental Social Psychology, 62, 335-343.
[2] Thibaut, J., & Walker, L. (1975). Procedural Justice: A Psychological Analysis. L. Erlbaum Associates Inc.
[3] Bies, R. J., & Moag, J. S. (1986). Interactional justice: Communication criteria of fairness. Dans R. J. Lewicki, B. H. Sheppard, & M. H. Bazerman (Eds.), Research on Negotiation in Organizations (Vol. 1, pp. 43-55). JAI Press.
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