Imaginez un instant que vous êtes victime d’une agression ou d’un malaise en pleine rue. Pensez-vous que vous serez secouru par une ou plusieurs personnes dans la foule ? Rien n’est moins sûr. Vous pourriez bien être une nouvelle fois victime… cette fois-ci de « l’effet du témoin ».
Dans notre dernier article, nous portions la focale sur le biais de conformisme, cette tendance ancrée en nous à agir comme les autres le font. Nous nous alignons sur l’avis de la majorité à laquelle nous nous fions aveuglément ou contre laquelle nous ne souhaitons pas nous opposer. La pression du groupe peut générer des situations dramatiques.
Le meurtre de Kitty Genovese en est la triste illustration. Dans la nuit du 13 au 14 mars 1964, cette femme a été assassinée à New York par un tueur psychopathe alors qu’elle rentrait chez elle. Pendant plus d’une heure, elle tenta d’échapper à son meurtrier. De nombreuses personnes furent témoins de cette poursuite. Pourtant, aucun ne s’interposa.
« Durant plus d’une demi-heure, 38 citoyens honnêtes et respectables du Queens ont regardé un tueur suivre et poignarder une femme, au cours de trois attaques distinctes, dans Kew Gardens ». Ainsi débutait l’article de Martin Gansberg quelques jours plus tard dans le New York Times. L’article pointait la lâcheté et l’indifférence des trente-huit témoins présents. Le retentissement de ce crime fut national.
Non-assistance à personne en danger
Le meurtre de Kitty Genevese a été le point de départ de recherches en psychologie sociale sur « l’effet du témoin » (appelé aussi « effet spectateur » ou « effet Kitty Genovese ») : dans des situations où une personne se retrouve en grande détresse (vol, agression, malaise…), les témoins sont inhibés par la présence des autres témoins présents sur les lieux. L’expérience relatée dans la vidéo ici-bas reprend celle, fondatrice, de Darley et Latané, les deux premiers chercheurs à avoir mis le doigt sur ce phénomène.
La conclusion de l’expérience s’avère très contre-intuitive : étrangement, une personne en détresse a plus de chance d’être secourue quand elle est en présence d’une seule personne. Plus il y a de témoins et plus ceux-ci restent apathiques. Ils pensent ou espèrent que d’autres iront secourir la personne en difficulté. Comme tout le monde réagit de la sorte, personne n’agit et la personne en détresse n’est pas secourue. Les témoins diluent leur responsabilité individuelle dans le groupe.
Que faire alors si, par exemple, vous êtes pris un jour d’un malaise en pleine rue ou dans une gare par exemple ? Comment briser cet « effet témoin » et accroître vos chances de survie ? Le plus sûr moyen d’y arriver, c’est de désigner du doigt et d’interpeller (si vous le pouvez) une personne au hasard dans la foule. Celle-ci pourra difficilement se défausser devant les regards qui ne manqueront pas de se poser sur elle. Bonne nouvelle : il suffit qu’une personne agisse pour que d’autres se joignent à elle.
Crédit Photo : Can Stock Photo – AntonioGuillem