Selon une enquête du Crédoc, 49 % des jeunes de moins de 30 ans estiment que la pandémie a été une période particulièrement pénible à vivre. 59 % des jeunes considéraient que leur vie actuelle correspondait à leurs attentes, soit 6 points de moins qu’en 2020. Le taux de satisfaction est en forte baisse pour les diplômés. De plus en plus de jeunes éprouvent des difficultés à se projeter à trois ou cinq ans. Seulement 37 % y arrivent quand 35 % en sont incapables. Seuls 15 % des jeunes peuvent se projeter au-delà de 5 ans. En 2021, 60 % des jeunes de 18-30 ans se montrent confiants face à l’avenir, soit 7 points de moins qu’en 2020.
L’emploi et le pouvoir d’achat : une double priorité
Les incertitudes économiques et plus particulièrement les anticipations de l’évolution du marché de travail semblent inquiéter les jeunes. L’emploi figure au deuxième rang des priorités des jeunes, derrière le pouvoir d’achat. Ils sont 29 % à souhaiter que les pouvoirs publics les aident à trouver un emploi, soit une progression de 8 points pour cet indicateur depuis 2020. Pour la signature d’un contrat de travail, 62 % privilégient la question de la rémunération. En deuxième position, figure la possibilité de conjuguer vie de famille et vie professionnelle. Trois jeunes sur dix (30 %) prennent en compte l’intérêt et le contenu du travail quand 26 % déclarent s’intéresser aux possibilités de carrière. 24 % des jeunes regardent également l’avenir du secteur professionnel. Pour 34 % des jeunes, la crise sanitaire a modifié leur projet professionnel quand 52 % estiment qu’elle n’a eu aucune incidence.
Une méconnaissance des aides sociales et un problème d’accès
24 % des jeunes estiment qu’ils ne bénéficient pas d’aides auxquelles ils pourraient pourtant prétendre. 46 % d’entre eux indiquent qu’ils ne recourent pas aux aides auxquelles ils ont le droit par absence d’information. 25 % par choix refuseraient les aides.
Les trois dispositifs d’aides sociales connus par les jeunes, en 2021, sont le RSA, les aides financières au logement et la prime d’activité. Un peu plus de sept jeunes sur dix indiquent avoir entendu parler de ces dispositifs. La connaissance de la garantie jeunes progresse (37 %, +5 points). La proportion de jeunes ayant entendu parler des dispositifs de caution (37 %) demeure stable. Parmi les aides dont la connaissance par les jeunes est en hausse figure la complémentaire santé solidaire (CSS) qui a été instituée à compter du 1er novembre 2019. 41 % en ont entendu parler, +7 points en un an. L’aide alimentaire est connue par 58 % des jeunes quand les cellules de soutien psychologique le sont par 52 %. Les aides à la création d’entreprises bénéficient d’un taux de reconnaissance de 45 %. Au moins un tiers des jeunes est au courant de l’existence de la plateforme « Un jeune, une solution » qui a pour objectif d’aider les jeunes à trouver une formation, un emploi, un service civique, des aides financières, etc.
La progression des discriminations contre les jeunes
59 % des jeunes déclarent avoir subi au moins une forme de discrimination ou un traitement inégalitaire au cours des cinq dernières années. 26 % mettent en avant des discriminations en fonction de l’âge, 24 % en fonction du sexe, 21 % en fonction des origines, 16 % en raison de leur appartenance religieuse, 13 % en lien avec un handicap et 12 % du fait de leur orientation sexuelle. Près de trois jeunes sur dix déclarent entre deux et quatre formes de discrimination différentes. Les discriminations selon le sexe s’exercent davantage sur les jeunes femmes. 31 % d’entre elles déclarent avoir subi une discrimination de ce type au cours des cinq dernières années, contre 17 % des jeunes hommes.
Pour les autres formes de discrimination, les hommes se déclarent plus souvent victimes que les femmes. Les jeunes hommes sont deux fois plus nombreux que les jeunes femmes à avoir connu au moins cinq formes de discrimination différentes dans l’année. 47 % des cas de discrimination ont eu lieu à l’école, à l’université ou lors d’une formation. 40 % des jeunes déclarent une discrimination pendant le déroulement de leur carrière professionnelle ou lors d’une recherche d’emploi. 38 % ont été discriminés dans un lieu de loisirs ou un lieu culturel, tel qu’un restaurant, un cinéma, une boîte de nuit ou encore un équipement sportif, et 35 % ont fait une expérience discriminante dans leurs relations avec les administrations ou services publics. 29 % des jeunes indiquent avoir subi une discrimination dans le cadre de la recherche de leur logement. Les discriminations lors des contrôles de police sont les moins citées avec 28 %.
Le succès du distanciel
60 % des étudiants ont suivi un enseignement à distance pendant la pandémie. Pour 30 %, ce mode d’enseignement était totalement nouveau. En revanche, 29 % pratiquaient déjà ce mode d’enseignement.
Les jeunes plébiscitent le recours au télétravail ou à l’enseignement à distance. Selon l’enquête Conditions de vie et aspirations du Crédoc, 40 % des jeunes en emploi aimeraient poursuivre l’expérience du télétravail. La plus forte proportion de jeunes souhaitant bénéficier du télétravail réside en Île-de-France.
Le phénomène Tanguy
Durant les décennies 1970, 1980 et 1990, le départ des enfants du foyer parental était considéré comme définitif. Depuis une dizaine d’années, la décohabitation est moins tranchée et accepte des allers-retours. Les difficultés rencontrées pour obtenir un emploi stable et pour trouver un logement expliquent ce changement. La stabilisation sentimentale, plus tardive, contribue également à des retours chez les parents.
Parmi les jeunes de moins de 18 à 30 ans habitant, en 2021, chez leurs parents, 58 % ont toujours connu cette situation quand 42 % d’entre eux sont revenus après un premier départ. Parmi les jeunes n’ayant jamais quitté le domicile parental, figurent en majorité des élèves, des étudiants sans activité professionnelle parallèle ou des célibataires. 70 % des jeunes revenus chez leurs parents ont déjà exercé une activité professionnelle par le passé.
La mobilité internationale contrariée
En 2017, lors d’un discours sur l’Union européenne, le Président de la République française, Emmanuel Macron, avait souhaité que la moitié d’une classe d’âge puisse avoir passé au moins six mois dans un pays européen, avant l’âge de 25 ans à l’horizon 2024. Début 2021, seulement 14 % des 18-30 ans ont passé six mois au moins dans d’autres pays européens au cours de leur vie. 20 % des 18-30 ans ne se sont jamais rendus dans un autre pays européen. La probabilité d’avoir effectué un séjour en Europe dépend du niveau de diplôme, du sexe, de situation familiale ou encore de la région de résidence. La pandémie a rendu plus complexe la mobilité internationale des jeunes. Le Brexit a également réduit le nombre d’étudiants français au sein des universités britanniques. En 2020, un tiers des jeunes de 18 à 30 ans a renoncé à un séjour de plus de quinze jours à l’étranger (hors vacances).
Les plus jeunes forment davantage le projet de partir à l’étranger que leurs aînés, 48 % des 18-24 ans envisagent de partir pour plus de quinze jours consécutifs, contre 41 % des 25-30 ans. Les jeunes en emploi sont plus nombreux que ceux au chômage à envisager l’expérience. De même, les jeunes en couple avec des enfants ont une plus forte appétence que les couples sans enfants, parents isolés ou célibataires sans enfants à souhaiter partir à l’étranger. Les jeunes diplômés résidant dans les grandes métropoles sont plus attirés que les autres par l’expérience de l’expatriation.
Millenials » contre « boomers »
Durant la campagne présidentielle, certains ont indiqué que les politiques publiques avantageaient les seniors au détriment des jeunes. L’opposition millenials/boomers est-elle surjouée ? 44 % des jeunes indiquent que la société ne privilégie ni les jeunes ni les plus âgés. 28 % des jeunes pensent néanmoins que la société avantage les plus âgés au détriment des jeunes. Dans le même temps, 17 % pensent l’inverse. 30 % des jeunes estiment ainsi ne pas être écoutés en raison de leur âge en 2021 contre 27 % en 2020. Ils sont 49 % à considérer que leur avis compte dans les espaces qu’ils fréquentent, soit à peine moins qu’en 2020. Ces jeunes sont généralement plus insérés économiquement que ceux ne se sentant pas pris en compte.
Soif de libertés individuelles et engagements
Les mesures d’urgence prises dans le cadre de la crise sanitaire divisent les jeunes. Ils sont 44 % à estimer que l’État doit préserver voire rétablir les libertés individuelles, quand 40 % pensent au contraire plus important que l’État protège la santé des citoyens, même si cela diminue les libertés de chacun.
43 % déclarent avoir fait partie ou participé aux activités d’une association (sportive, culturelle, de loisirs, de jeunes, humanitaire, politique) contre 42 % l’année précédente. En 2021, près d’un jeune sur deux (48 %) donne bénévolement de son temps au sein d’une association ou d’une autre organisation (parti politique, syndicat, etc.). En 2021, le sport arrive en tête des domaines dans lesquels les jeunes s’engagent (31 %). Il est suivi par le domaine de la jeunesse et de l’éducation (19 %). L’environnement est le domaine dans lequel les jeunes souhaitent le plus s’engager (22 %). Les deux autres domaines à même de susciter le bénévolat sont le sport et la lutte contre les discriminations (19 % chacun).
Les difficultés d’accès au logement
Habitant souvent dans des petits logements (30 m² par personne, pour les ménages dont la personne de référence a moins de 30 ans, contre 60 m² chez les 65 ans ou plus), les jeunes sont plus nombreux à estimer que leurs conditions de logements sont mauvaises. Les confinements ont accru cette perception.
Une montée des syndromes dépressifs surtout chez les jeunes femmes
Selon l’étude sur la santé mentale de Santé publique France (COVIPREV), 31,5 % des jeunes souffrent de syndromes dépressifs en 2021, contre 12 % en 2020. L’année dernière, 45 % des jeunes déclarent avoir un état d’esprit négatif quand 46 % affirment avoir un état d’esprit positif. Les femmes sont plus pessimistes que les hommes. En 2021, 33 % des jeunes hommes ont un état d’esprit globalement négatif (+5 points en un an) contre 56 % des femmes (+11 points). 14 % de ces dernières se déclarent inquiètes, contre 8 % des hommes.
Si la pandémie a accru certaines des difficultés que rencontrent les jeunes de moins de 30 ans, elle n’a pas bouleversé leur vie quotidienne. Elle a freiné la mobilité et a rendu leur vision du long terme moins précise. Les problèmes de logement, d’accès aux formations étaient déjà prégnants avant la crise sanitaire. Le regard des moins de 309 ans sur la société est assez proche de celui des aînés.
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