En 2021, l’économie française a fait preuve d’une réelle résilience avec une augmentation de son PIB de 7 %, après un recul de 8 % en 2020. Les entreprises ont repris le chemin de la production malgré la persistance des contraintes sanitaires et malgré la multiplication des goulets d’étranglement.
Si le rebond de la croissance est en soi assez logique compte tenu du montant des aides appliquées dès le début de la crise sanitaire et des plans de relance, la surprise est venue de l’emploi. Avec près de 650 000 créations d’emploi en 2021, l’économie française a déjoué les sombres prévisions en vertu desquelles, la sortie de crise sanitaire devait s’accompagner d’une envolée du chômage.
Fin 2021, le niveau d’emploi est supérieur à celui d’avant l’épidémie (près de 300 000). Le taux de participation à l’emploi (86 %) tout comme le taux d’emploi (79 %) sont à leur plus haut niveau sur ces vingt dernières années. La résorption du chômage qui avait commencé avant l’épidémie s’amplifie. Le taux de chômage, selon Eurostat, est désormais de 7,4 %. Les faiblesses structurelles françaises, le niveau insuffisant des compétences, le coût du travail élevé, ne pèsent pas sur les créations d’emploi. Les perspectives de croissance incitent les entreprises à recruter tout comme la nécessité d’accélérer la digitalisation.
Leurs taux de marges bénéficiaires étaient, en 2021, à 39 % au-dessus de leur niveau de ces dix dernières années. Leurs profits réels après impôts et intérêts avant dividendes sont au plus hauts depuis 2002. Leur endettement net est inférieur en 2021 à son niveau d’avant crise sanitaire, les entreprises ayant conservé une partie des prêts garantis par l’État sous forme de trésorerie. Le nombre de faillites d’entreprises contrairement aux prévisions est resté faible en 2021, en dessous de 30 000 en rythme annuel, contre 50 000 en moyenne lors des dix années précédant la crise sanitaire. L’investissement des entreprises a fortement augmenté. En volume, il est 50 % plus élevé qu’en 2002.
Perte de parts de marché
Si le PIB a dépassé son niveau de mars 2020 dès le mois de septembre 2021, l’industrie demeure à la peine et semble poursuivre son déclin engagé il y a une vingtaine d’années. La production industrielle est ainsi 10 % en dessous de son niveau de 2007. Le chiffre d’affaires de l’industrie était, fin 2021, inférieur de 3,6 % à celui d’avant-crise. L’industrie représente 10 % du PIB contre plus de 12 % au début du siècle. Le solde industriel a été, en 2021, négatif de plus de 65 milliards d’euros. La France a perdu des parts de marchés tant en Europe qu’au niveau mondial. En période de forte croissance de la consommation, les importations augmentent plus vite que les exportations. La France est absente pour la production de biens qui font l’objet d’une forte demande (électronique, informatique, équipement de la maison, matériels nécessaires pour la transition énergétique). La France a été handicapée par les problèmes d’approvisionnement que le secteur automobile a rencontrés et par la reprise lente du secteur aéronautique. Au-delà de ces problèmes, l’économie française reste centrée sur des productions de gamme moyenne. Elle ne dispose pas, ainsi, de producteurs automobiles hauts de gamme (en faisant abstraction de DS et d’Alpine qui sont des marques assez confidentielles) quand l’Allemagne en compte au moins quatre (Mercedes, BMW, Porsche et Audi) et le Japon deux (Infnity et Lexus).
La faiblesse de la construction de logements constitue une autre faille de l’économie française. Si les besoins en nouveaux logements sont estimés à 500 000 par an, la production peine à dépasser 375 000. La rareté du foncier, le coût élevé de la construction, le manque d’industrialisation sont autant de facteurs qui peuvent expliquer ce déficit qui contribue à la hausse du prix des logements, ces derniers ayant doublé de 2002 à 2021.
Le maintien d’un haut niveau d’épargne de précaution a caractérisé l’année 2021. L’encours des comptes courants a dépassé 500 milliards d’euros. Chaque ménage a en moyenne 17 000 euros sur son compte courant, contre 14 000 avant la crise sanitaire. L’encours des livrets d’épargne, qu’ils soient ou non réglementés, est également à son plus haut niveau. Les Français sont attentistes, voire défiants, face à la situation économique. Une des clefs de la sortie de la crise est l’amélioration du niveau de confiance des ménages permettant un déblocage de l’épargne de précaution et son affectation à la consommation, à l’investissement ou à des placements de long terme.
Or celle-ci est indispensable pour financer tout à la fois les importantes dépenses sociales et la transition énergétique. Le retour de l’inflation pourrait également perturber l’activité. Pour tenter de limiter les effets de la hausse des prix, les ménages pourraient en effet être incités à épargner davantage au risque de ralentir la croissance. Ce phénomène d’encaisse n’est pas nouveau. Il a été constaté lors de précédentes vagues d’inflation. L’inflation a tendance à accroître les tensions sociales du fait qu’elle pèse sur le niveau de vie des personnes dont les revenus ne sont pas indexés. Si pour le moment, la hausse des taux d’intérêt est limitée, elle pourrait s’accroître avec le retour en vigueur des critères budgétaires européens prévus pour 2023 ou 2024.
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