La confiance, toujours la confiance. Chez Netflix, c’est la base, ce à partir de quoi le reste est possible. Elle permet de libérer la parole. Pas de franchise en effet sans confiance préalable. L’une des expressions de cette franchise en entreprise s’appelle la transparence. Ce mot en général fait peur dans une organisation, où le culte du secret règne à certains étages. Tout le monde doit-il nécessairement tout savoir ? Doit-on obligatoirement tout dire ?
C’est la rançon du succès : Netflix est cotée Wall Street. Cela suppose de nombreuses restrictions dans l’accès à l’information. Les résultats trimestriels doivent être communiqués en priorité à Wall Street afin d’éviter tout délit d’initié. Il suffit qu’un salarié connaisse les résultats avant que Wall Street n’en soit informé pour que ce risque existe. Quoi de plus tenant de tirer profit de cette information en achetant des actions Netflix un peu avant la communication officielle et les revendre tout de suite après ? Quoi de plus tenant que d’empocher aussi facilement et rapidement des milliers, voire des millions de dollars ? C’est tentant, mais illégal. Un coup tordu qui vous mène directement à la case prison.
Plus d’avantages que d’inconvénients
Pourtant, rien n’a changé chez Netfix. Il n’y a pas eu un avant et un après-Wall Street. Avant, toutes les informations concernant l’entreprise étaient disponibles pour tous les salariés. Après… c’est la même chose. Les résultats trimestriels de l’entreprise sont communiqués aux 700 cadres supérieurs de l’entreprise, mais n’importe quel salarié peut les avoir s’il le demande. C’est la volonté affichée de Reed Hastings qui en appelle à la responsabilité de chacun. Pour le cofondateur de l’entreprise, un salarié qui n’a pas accès aux informations de l’entreprise ne peut pas se sentir partie prenante de l’entreprise. En 2014, un cadre indélicat a récupéré des informations stratégiques sur l’entreprise et est parti à la concurrence. Bien sûr, cette affaire a fait l’objet de poursuites judiciaires. Mais Hastings garde le cap : ce n’est pas parce qu’une personne a fauté que tous les collaborateurs de l’entreprise doivent être suspectés.
Il en va de même concernant les projets de réorganisation. Quand on pense à supprimer un service ou des postes, on en informe immédiatement les principaux intéressés. Chez Netflix, supprimer un poste signifie licencier, pas recaser. Ainsi, un responsable de service doit dire à un salarié qu’il y a 50 % de chance que son poste disparaisse dans les semaines qui viennent. Tous les salariés de Netflix ne sont pas en phase avec cette logique. À quoi bon inquiéter une personne quand rien n’est encore sûr ? Autant communiquer une fois les décisions prises, mais pas quand on en est encore à faire des hypothèses, quand on nage dans un flou artistique. Hastings enfonce le clou :
Ce qui est intéressant dans le livre de Hastings et Meyer, c’est qu’il laisse la parole aux salariés qui ont un avis discordant. Franchise toujours. Ce qui est la moindre des choses pour un ouvrage prônant la transparence tous azimuts.
Ne pas édulcorer la vérité
En matière de communication interne, là aussi on bannit la langue de bois. Cette langue de bois utilisée constamment dans l’entreprise, au point de plus s’en rendre compte. Quand un salarié commet une faute et est licencié, on explique à tout le monde pourquoi il a été licencié, quelle faute a été commise. La direction ne cherche pas à enjoliver la situation. On ne va pas dire que la personne concernée « va quitter l’entreprise pour relever ailleurs de nouveaux challenges ». La vérité, rien que la vérité. Seules les raisons personnelles peuvent ne pas être communiquées aux salariés : si un salarié est absent pour cause de maladie grave par exemple, ce n’est pas l’entreprise de révéler de quelle maladie il s’agit. Le choix de dire ou ne pas dire incombe au salarié concerné.
Reconnaître sa vulnérabilité
Autre expression de la transparence : avouer ses insuffisances. Hastings recommande de ne pas trop parler de ses succès, mais de ne pas hésiter à pointer ses insuffisances devant les autres. Erin Meyer s’appuie sur une étude dirigée par la professeure Lisa Rosh de Lehman Collège. Cette étude tend à montrer que quand une personne très compétente reconnaît sa vulnérabilité, celle-ci se voit encore plus appréciée. En revanche, si une personne reconnue comme peu compétente le fait, cette dernière sera encore moins appréciée. Erin Meyer appelle cela l’effet Pratfall (chute sur le derrière).
Comme évoqué un plus haut, cette transparence vise faire comprendre aux salariés non pas qu’ils appartiennent à l’entreprise, mais qu’ils sont l’entreprise. Confiance, responsabilité, liberté.
Crédit Photo : Anastasia Shuraeva – Pexels