Avant le deuxième confinement, la moitié des salariés et 58 % des managers étaient en détresse psychologique. Quant aux chefs d’entreprises, ils perdaient déjà le sommeil lors du premier confinement, rongés par l’inquiétude d’assister impuissants à la faillite de leur société. Neuf mois plus tard, il est peu probable qu’ils aient réussi à trouver le repos. Car peu de choses ont changé. Le Coronavirus est toujours là, la France s’est reconfinée et les perspectives sont décourageantes : il faut tenir et vivre encore plusieurs mois avec ce virus. Pour aider les salariés et leurs patrons à garder le moral et calmer leurs angoisses, plusieurs entrepreneurs proposent aux entreprises des cours de sport et de méditation, des jeux collectifs à distance, ainsi que de la lecture.
Nombre de morts, de contaminations, de clusters, d’entrées et de sortie des services de réanimation… Chaque mardi, depuis neuf mois, aux alentours de 18 heures, le ministre de la Santé, Olivier Véran, et le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon font le point sur l’évolution de l’épidémie de la Covid-19. Le 17 novembre dernier, et pour la première fois, le directeur général de la Santé a ajouté une nouvelle donnée au bulletin de santé hebdomadaire. « On observe une augmentation importante des états dépressifs. Le nombre de personnes concernées a doublé entre fin septembre et début novembre » a-t-il indiqué. Le lendemain, à son tour, le ministre de la Santé s’en est inquiété : « Nous voulons éviter une troisième vague qui serait une vague de la santé mentale ».
Le Coronavirus ne fait pas uniquement des dégâts physiques, il attaque aussi la santé mentale, ceci n’est pas vraiment un scoop. Déjà, lors du premier confinement, de nombreuses enquêtes, des psychiatres, et des psychologues alertaient sur le sujet. Empreinte Humaine, cabinet de conseil sur la qualité de vie au travail notait qu’un quart des salariés présentaient un risque de dépression nécessitant un traitement*. Olivier Torrès, enseignant-chercheur à l’université de Montpellier, pointait de son côté la dégradation de la santé mentale des chefs d’entreprises. Sentiment d’impuissance, sommeil rongé par l’angoisse de voir son affaire péricliter, tous les éléments semblaient réunis pour conduire à une augmentation des burn-out**. « Le caractère inédit de cette crise sanitaire et des mesures prises, mais aussi le risque d’atteinte à la santé physique ainsi que l’incertitude sont autant de facteurs de stress » explique Valérie Langevin, psychologue du travail et experte sur les risques psychosociaux au sein de l’INRS, organisme de prévention des risques professionnels. Ajoutez à cela la durée — neuf mois maintenant que chacun travaille en mode dégradé — et vous obtenez des patrons et des salariés épuisés, au bord du burn-out.
Juste avant le 2e confinement, 49 % des salariés et 58 % des managers étaient en situation de détresse psychologique***. Les recettes pour préserver la santé mentale et motivation des salariés sont connues. Elles font d’ailleurs partie des préconisations de l’INRS : une communication claire et transparente de la part du dirigeant comme des managers, un accompagnement du télétravail avec la mise en place de ressources (outils et formation) et d’un cadre pour éviter la surcharge de travail, un management participatif, etc. Ces actions préservent sur le long terme. Au quotidien pour éviter que la cocotte n’explose, il peut être bon de se défouler par le sport, de se calmer avec la méditation, de s’amuser entre collègues ou encore de s’évader par la lecture. Plusieurs start-ups ont d’ailleurs créé des offres clés en main pour les entreprises afin que salariés, managers et patrons traversent au mieux cette période tourmentée. Voici une sélection.
S’évader par la lecture
Créée en 2019, la jeune pousse Rocambole, se présente comme le « Netflix du livre ». « De nombreuses entreprises incitent leurs collaborateurs à lire davantage. Car la lecture ouvre sur le monde, sur l’autre. Elle amène une réflexion, des idées, et crée la discussion. Nos lecteurs parlent, débattent auprès de la machine à café du dernier épisode qu’ils viennent de lire. Par temps de confinement, quand on est cantonné chez soi, c’est aussi le seul moyen de s’évader », explique François Delporte, cofondateur de la start-up. En s’abonnant au mois, salariés, managers et patrons ont accès en ligne, de leur smartphone ou tablette, à plus de 70 séries à lire : de la fiction avec des comédies et polars entre autres, ou des enquêtes, toutes écrites par des auteurs maison. « Celle retraçant l’envers du décor des start-ups a cartonné », affirme le cofondateur. Chaque série est découpée en épisodes. Chaque épisode se lit en cinq minutes. Ainsi, il n’y a plus d’excuse. Dirigeants, managers et salariés débordés, chacun peut trouver cinq minutes par jour, lors de trajets ou en attendant son rendez-vous chez le médecin, pour lire. Le coût : comptez 50 euros par mois pour abonner cinquante salariés.
Cours de sport pour se défouler ou de yoga pour se détendre
« Une des clé pour bien vivre cette période c’est de se dépenser physiquement et de se recréer une routine », affirme Gaëlle Frizon de la Motte dirigeante et fondatrice de la plateforme OLY Be. Chaque semaine, en général sur la pause déjeuner, les collègues d’une même entreprise se donnent rendez-vous pour suer ensemble lors de cours de fitness, ou se relaxer avec des cours de sophrologie ou de yoga. Les cours se déroulent en visio, et sont animés par des professeurs agréés. « Ils durent d’une demi-heure à une heure. Mais nous avons aussi créé lors du précédent confinement des ateliers d’une durée de deux heures pour apprendre à gérer son stress, à adopter les bonnes postures, ou à avoir une bonne alimentation » explique la dirigeante. Un esprit sain dans un corps sain. Coût : 30 euros par mois pour un accès à tous les cours.
S’amuser entre collègues
La start-up nantaise Kiplin s’est donné pour mission de lutter contre les maux du télétravail, à savoir la sédentarité et l’isolement. « Les chefs d’entreprises souscrivent à un abonnement. Et pendant trois à six mois, nous fournissons des jeux digitaux à pratiquer en équipe de cinq personnes et à distance pour pousser chacun à se bouger. Trois mois, c’est le temps minimal nécessaire pour ancrer une nouvelle habitude » explique Vincent Tharreau, le dirigeant. Chaque jeu dure en moyenne 15 jours. Chaque jour, les équipes reçoivent sur la plateforme un défi à relever : « chaque membre doit réaliser 10 000 pas ». Le smartphone placé dans la poche fait foi en comptant le nombre de pas. Chaque défi gagné est récompensé par un trophée. L’équipe gagnante est celle qui en a le plus. Alors sur le fil de discussion, un par équipe, on s’encourage. Il faut gagner ce défi ! Le mois suivant, on recommence avec un nouveau jeu. Coût : à partir de 5000 euros pour 500 utilisateurs pour six mois de jeux.
* Enquête réalisée en ligne du 31 mars au 8 avril 2020 auprès d’un échantillon de 2003 salariés.
** Enquête réalisée en ligne entre le 16 et 22 avril 2020 menée auprès de 1925 chefs d’entreprises, commerçants, artisans, professionnels libéraux et agriculteurs.
*** 4e baromètre d’Empreinte Humaine, enquête réalisée en ligne du 19 au 28 octobre auprès d’un échantillon de 2004 salariés.