La principale motivation qui conduit à innover, c’est de trouver une solution à un problème. Ce problème prend souvent la forme d’une contrainte. Le système D (comme Débrouille) témoigne de cela.
Les Cubains, confrontés au blocus américain, ont su faire montre de leur inventivité en détournant des objets du quotidien de leur fonction initiale. En Inde, on parle de jugaad. Pour Navi Radjou, qui a popularisé cette notion en Occident, « Jugaad, c’est un mot hindi, qui veut dire “débrouillardise ou capacité ingénieuse d’improviser une solution efficace dans des conditions difficiles”. Appliquée à l’économie, c’est une pratique très courante dans les pays émergents, comme l’Inde, la Chine, le Brésil ou les pays africains. Ces pays se caractérisent par d’énormes contraintes et une rareté des ressources. Pourtant les entrepreneurs y sont capables de concevoir des solutions tout à fait abordables et durables avec très peu de moyens. L’innovateur jugaad convertit l’adversité en opportunité et fait mieux avec moins. Il produit des solutions qui amènent plus de valeur aux consommateurs tout en utilisant moins de ressources. »[1]
Contrainte libératoire
Cet innovateur « jugaad » a bien des points communs avec l’artiste, notamment avec celui qui érige la contrainte en exercice de style. Un courant appelé « contrainte artistique volontaire » ou contrainte libératoire a mis ce processus créatif en son cœur. Parmi les artistes inspirés par cette démarche, le plus célèbre est sans doute Georges Perec. Avec son roman La disparition (1969), l’auteur réalise le tour de force de produire un ouvrage de plus de 300 pages, combinaison de 360 000 lettres ne comportant aucune lettre « e ».
Preuve est faite que la contrainte provoque la mobilisation de l’imagination.